ANGOLA- COVID-19 : l’aggravation des conditions déjà difficiles pour les travailleurs

ANGOLA
Mots Clés : LA BATAILLE SYNDICALE CONTRE LE COVID-19 Bulletins d’Information Angola

L’Angola a confirmé ses deux premiers cas positifs de COVID-19, le 21 mars 2020. Il s’agissait dans les deux cas des cas importés du Portugal. Comme dans la plupart des pays d’Afrique, le gouvernement angolais a rapidement adopté un certain nombre de mesures afin de contenir la propagation du virus et d’éviter qu’il ne se propage largement au sein de la population.

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Les mesures de restriction

Le gouvernement angolais a déclaré l’état d’urgence, initialement pour une durée de 15 jours renouvelable, et a imposé un certain nombre de restrictions. Parmi ces mesures, on peut citer :
La fermeture d’institutions d’enseignement ;
L’interdiction d’entrer et de sortir du pays, avec des exemptions pour le fret ;
La restriction des mouvements entre les provinces à l’intérieur du pays ;
La suspension des services publics, à l’exception des services essentiels, tels que les hôpitaux et les pharmacies ;
L’interdiction de réunions de plus de 50 personnes ;
L’interdiction de tous les rassemblements de divertissements et de cultes religieux.
La fermeture des activités commerciales, excepté la prestation de services essentiels liés, notamment, à l’alimentation, la transaction bancaire, la presse, l’hôtellerie, la restauration rapide à emporter et la station-service.
La fermeture des activités industrielles et agricoles, excepté les activités relevant de la production de denrées alimentaires et de boissons, de produits de santé essentiels, et de prestation de services à l’exploitation pétrolière, gazière et minière.
Le gouvernement a également annoncé des mesures de protection de l’emploi de certains groupes de personnes à risque devant être libérées de l’obligation d’opérer à partir de leurs postes habituels de travail. L’employeur ne doit les licencier en raison de leur absence au travail.
L’état d’urgence a été renouvelé deux fois jusqu’au 10 mai 2020, avant que le gouvernement ne commence à assouplir lentement les restrictions. Pendant ce temps, le 10 avril, 257 médecins cubains sont arrivés en Angola pour aider à la lutte contre le COVID-19.
Au 14 mai 2020, l’Angola comptait 45 cas confirmés, 14 cas de guérison et 2 cas de décès.

Des effets visibles sur les travailleurs

L’Angola a connu une forte hausse des prix des produits alimentaires et des produits de base essentiels, depuis la promulgation de mesures visant à contenir et à prévenir la propagation du coronavirus. Par conséquent, de nombreux travailleurs éprouvent d’énormes difficultés à subvenir à leurs besoins et à ceux de leur famille.
Même si les salaires des travailleurs en général étaient censés être protégés par le décret présidentiel qui a été publié dans le cadre de la déclaration de l’état d’urgence, dans la pratique, de nombreux employeurs n’ont pas adhéré au décret. Des rapports indiquent que de nombreux travailleurs ont reçu une notification de résiliation de contrat. Un certain nombre de travailleurs dans le secteur de l’hôtellerie et de la restauration n’ont pas touché de salaire depuis l’annonce des restrictions. Les employeurs invoquent le manque de ressources pour expliquer leur incapacité à payer les salaires.
Dans le secteur de l’enseignement privé, les propriétaires ont exigé le paiement de 60 % des frais de scolarité des étudiants, alors que les cours étaient suspendus depuis le mois de mars.
Pendant ce temps, au sein des communautés, la pénurie d’eau potable pour la consommation humaine et le maintien d’une hygiène de base a eu un impact négatif sur la lutte contre le coronavirus.
Là encore, les personnes dont le test COVID-19 s’est révélé positif ont également souffert de discrimination et de stigmatisation.

Les syndicats et leur rôle

Les réponses et les interventions du gouvernement ont été formulées sans consulter les syndicats, en dépit des conséquences de ces mesures sur les travailleurs
Jusqu’à présent, les syndicats sont confrontés à un défi majeur de financement parce que le paiement des cotisations syndicales a chuté de manière spectaculaire. La plupart des bureaux des syndicats sont fermés. Une confédération comme l’Union nationale des travailleurs angolais (UNTA) a dû mettre en place un horaire de travail rotatif quotidien avec deux employés et un superviseur.

Les rapports des responsables syndicaux indiquent que le télétravail ou le travail virtuel est difficilement envisageable en raison du coût élevé de la connectivité Internet dans le pays. Les statistiques montrent que le coût mensuel des données Internet est égal ou supérieur à quatre fois le salaire minimum national en Angola.
Dans l’ensemble, des mesures de distanciation sociale sont pratiquées par tous les membres du syndicat conformément à l’interdiction des rassemblements publics dans le cadre de l’état d’urgence.

Malgré les difficultés du travail syndical, trois centrales syndicales nationales dirigées par l’UNTA ont tenté de travailler ensemble dans la lutte contre COVID-19. Le 1er mai 2020, lors de la commémoration de la Journée internationale des travailleurs, les organisations ont publié une déclaration commune appelant à la sécurité et à la protection des travailleurs, au maintien des emplois, à la protection des droits des travailleurs et à l’amélioration du dialogue social.

L’UNTA a en outre produit des vidéos éducatives sur les protocoles sanitaires relatif au COVID-19 afin de sensibiliser ses membres et le public par le biais de plateformes de médias sociaux. Cela s’ajoute à plusieurs apparitions de responsables syndicaux dans des discussions à la télévision et à la radio pour exprimer les préoccupations et les besoins des travailleurs pendant la période de restrictions. Certains des syndicats affiliés à l’UNTA ont également participé à la fourniture d’équipements de protection individuelle (EPI) aux hôpitaux et d’équipements de protection pour les travailleurs du secteur informel. Un certain nombre de syndicats locaux ont également signé des accords avec les employeurs afin de garantir le maintien des emplois pendant cette période.
À ce jour, il n’y a pas eu de session tripartite pour traiter des questions relatives au COVID-19. Les employeurs et les travailleurs ont tenu des réunions séparées pour aborder les questions d’emploi à la lumière du COVID-19.

Conclusion

Bien que le gouvernement angolais semble avoir adopté un certain nombre de mesures de restriction de la circulation des personnes pour contenir la propagation du virus, il n’est guère prouvé que ces mesures ont été accompagnées de dispositions sociales adéquates pour alléger le fardeau de la crise sur les travailleurs et les plus vulnérables de la société.

La capitale de l’Angola, Luanda, est l’une des villes les plus chères du monde. Cependant, environ la moitié de la population angolaise vit avec moins de 2 dollars par jour. Ainsi, les restrictions imposées pour contenir la propagation du coronavirus sans le bénéfice de mesures sociales d’accompagnement ne pourraient que signifier davantage de difficultés pour la majorité de la population angolaise.
Le pays a enregistré des taux de croissance économique élevés en raison des années de boom pétrolier. Mais cette croissance n’a pas été accompagnée d’investissements dans les services publics nécessaires comme la santé publique, l’éducation et d’autres services sociaux et n’a fait qu’engendrer d’énormes inégalités économiques au fil des ans. L’absence d’eau potable en quantité suffisante dans tout le pays a été l’indice le plus révélateur de la privation sociale en Angola pendant la crise sanitaire.
Là encore, l’absence de consultation du gouvernement avec les principales parties prenantes concernées, notamment les syndicats et les employeurs, dans la formulation des interventions politiques face à une urgence nationale comme la crise de santé publique provoquée par la pandémie de coronavirus est une source majeure de préoccupation.

Comme d’autres syndicats en Afrique et ailleurs dans le monde, les syndicats angolais devraient être plus exigeants dans leur quête d’influencer le monde en transformation qui va forcément émerger de la pandémie de COVID-19. Alors que nos pays commencent à sortir des restrictions et à définir une nouvelle norme dans notre vie économique et sociale, les syndicats doivent intensifier leurs efforts pour inscrire la sécurité et la santé des travailleurs, les salaires décents et la protection sociale au premier rang des priorités politiques, économiques et sociales de nos pays.
À l’avenir, nous devrions être déterminés à nous battre plus fort !

pdf / LES RÉPONSES AFRICAINES FACE À LA CRISE SANITAIRE DU COVID-19 , LE RÔLE DES SYNDICATS (VOL 2)

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