L’Organisation régionale africaine de la Confédération syndicale internationale (CSI-Afrique) (www.ituc-africa.org) a condamné la prise de pouvoir anticonstitutionnelle et antidémocratique survenue au Niger le 26 juillet, où la garde présidentielle a déclaré la loi martiale après avoir destitué le président. Nous réitérons notre engagement en faveur de la constitutionnalité et de la démocratie.
Toutefois, nous sommes vivement préoccupés par la décision de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) qui cherche à rétablir le président déchu au pouvoir par le biais d’un ultimatum et de la force militaire. Nous tenons à affirmer catégoriquement et sans ambages que les travailleurs africains rejettent l’option militaire pour sortir de l’impasse politique dans laquelle se trouve le Niger. Nous appelons la CEDEAO, au lieu de se mobiliser pour une intervention militaire, à envisager et à engager une action diplomatique et politique vigoureuse et rapide pour désamorcer cette crise.
Nous suivons la situation sécuritaire au Sahel depuis quelques années, et nos observations suggèrent que la situation sécuritaire reste difficile, fluide et problématique. La menace d’un cocktail d’extrémistes, de terroristes et d’insurgés continue de peser sur les vies et les moyens de subsistance. Le nombre de personnes et de travailleurs tués, d’enfants enlevés, d’écoles détruites et d’agriculteurs contraints d’abandonner leur exploitation se chiffre par milliers. Ces attaques expliquent en partie pourquoi les pays du Sahel affichent des taux élevés de pauvreté, de déplacés internes, d’enfants non scolarisés et de morts violentes de civils.
Au vu de ce qui précède, la CSI-Afrique considère que le recours à la force brute par la CEDEAO pour sortir de l’impasse politique actuelle au Niger n’est absolument pas souhaitable ni acceptable. La CSI-Afrique s’oppose fermement à l’option militaire. Nous craignons qu’une telle option ne déstabilise et n’aggrave la situation déjà précaire au Niger, avec de réels effets de contagion pour l’ensemble de la sous-région ouest-africaine et pour le continent africain dans son ensemble. Nous assistons déjà à des jeux d’intérêts géopolitiques externes et à la profération de contre-menaces de la part de certains membres de la CEDEAO contre toute invasion militaire [étrangère] au Niger. Toutes ces menaces et contre-menaces sont en train d’échauffer l’atmosphère politique de la sous-région et constituent une véritable menace pour la paix, la stabilité et la cohésion.
La CEDEAO doit changer de cap en engageant de manière tactique un dialogue diplomatique et politique pour sortir de cette impasse. Jusqu’à présent, aucune balle n’a été tirée et aucun décès n’a été enregistré au Niger à la suite du coup d’État. Cette situation ne doit pas dégénérer en une confrontation militaire violente. Nous sommes convaincus que des options pacifiques existent et qu’elles doivent être véritablement poursuivies. Nous disons NON à l’intervention militaire et OUI à un dialogue véritable et inclusif.
Enfin, nous réitérons à égard notre appel à la CEDEAO et à l’Union africaine, lancé dans notre précédente déclaration sur l’impasse politique au Niger, pour qu’elles prennent les mesures nécessaires à la convocation d’une assemblée solennelle afin de discuter des questions de sécurité et des problèmes connexes qui menacent la stabilité socio-économique et politique de la région du Sahel et du continent africain.
Kwasi Adu-Amankwah - Secrétaire général, CSI-Afrique
Publié aujourd’hui, 6 août 2023.